Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1857, octavo, tome 14.djvu/487

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Le zèle des prélats et des principaux membres des états enleva un vote unanime [1]. Dans la suite, l’assemblée devint de plus en plus docile aux volontés du roi [2]. La Provence fut intimidée par quelques exils [3] et se montra aussi docile que le Languedoc [4] ; il en fut de même en Bourgogne [5]. La Bretagne paraissoit plus obstinée ; mais elle finit par céder [6]. Les plaintes de Mme de Sévigné sur le sort de la Bretagne, jadis « toute libre, toute conservée dans ses prérogatives, aussi considérable par sa grandeur que par situation, » attestent qu’on ne tenoit plus compte « du contrat de mariage de la grande héritière [7]. » Les états des petites provinces n’auroient pu tenter une résistance qui avoit été si facilement vaincue en Languedoc, en Provence, en Bourgogne et en Bretagne. Colbert songeoit à les supprimer, et à faire vivre tous ces pays sous une loi commune [8] ; mais il céda aux remontrances de l’évêque de Tarbes, qui lui représentoit que ce changement ne pouvoit « rencontrer qu’un consentement forcé de tous ces peuples, qui regardoient la grande puissance du roi et Sa Majesté armée auprès d’eux, et ne ressentiroient pas moins la perte de leur liberté et de tant de glorieuses marques de leurs services que les rois prédécesseurs de Sa Majesté leur avoient laissées de règne en règne. » [9]

Les pays d’états continuèrent d’exister jusqu’à l’époque de la Révolution.


V. TIERS ÉTAT AUX ÉTATS GÉNÉRAUX DE 1302.


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Le tiers état, comme on l’a dit, figura aux états généraux de 1302, sous le règne de Philippe le Bel. On peut citer, entre autres preuves, une pièce intitulée : La supplication du peuple de France au roi contre le pape Boniface VIII [10]. Le tiers état s’adresse

  1. Correspondance administrative, t. I, p. 54 et 64.
  2. Ibid., p. 288, 289, 290, 308, 316.
  3. Ibid., p. 399.
  4. Ibid., p. 403, 405.
  5. Ibid., p. 445-446.
  6. Ibid., p. 498 et 500.
  7. Lettres de Mme de Sévigné du 6 novembre 1689 et du 18 janvier 1690.
  8. Correspondance administrative sous Louis XIV, t. I, p. 112.
  9. Ibid.
  10. Voy. Duboulay, Hist. de l’Université de Paris, t. IV, p. 15 ; P. du Puy, Différend de Philippe le Bel et de Boniface VIII, p. 214 : , Preuves des libertés de l’Église gallicane, t. I. p. 108.