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Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1857, octavo, tome 15.djvu/236

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du duc de Noailles donnée à son fils enfant, sans l’avoir demandée. — Rouillé quitte les finances avec douze mille livres de pension. — Marchault lieutenant de police ; son caractère. — Grâces faites à Châteauneuf ; à Torcy, qui marie sa fille à Duplessy-Châtillon ; au duc d’Albret, qui veut épouser la fille de Barbezieux.


Un événement, que nous verrons bientôt, puisqu’il arriva le 28 janvier de cette année 1718, en laquelle nous allons entrer, m’a paru mériter d’en approcher les choses un peu précédentes qui l’ont préparé, et de préférer pour cette fois une suite plus éclaircissante des choses qui l’ont amené, à un scrupule trop exact des temps même peu éloignés, et qui auroit fait perdre de vue ce qui peu à peu a produit l’événement, lorsqu’il sera temps de le raconter.

On a vu (ci-dessus, p. 129), la brouillerie du duc de Noailles et de Law, le replâtrage qui s’y fit, le gré sensible que M. le duc d’Orléans sut au duc de Noailles de sa complaisance et de ses protestations à cet égard, et l’âpreté avec laquelle il en sut profiter pour en tirer le gouvernement et la capitainerie de Saint-Germain, qu’il avoit toute sa vie muguetée, et que la fortune lui livra précisément dans ce favorable instant par la prompte mort de Mornay sans enfants. Il y avoit longtemps que Noailles ; jaloux de Law, troubloit sa banque et ses desseins. Non seulement il le barroit en tout par les manœuvres et l’autorité de sa place dans les finances ; mais il lui suscitoit dans les conseils et dans le parlement tous les contradicteurs qu’il pouvoit, et qui très souvent arrêtoient et faisoient même échouer ses propositions les plus raisonnables. Law, qui, comme je l’ai expliqué, venoit chez moi tous les mardis matin, m’en faisoit continuellement ses plaintes, et m’en prouvoit d’autant plus aisément la raison et le mal que faisoit aux affaires cette contradiction perpétuelle, qu’on a vu, d’une part, comment j’étois avec le duc de Noailles, et, d’autre part, mon incapacité souvent avouée sur la matière des finances. Mais il y a pourtant des choses qui dépendent quelquefois plus du bon sens que de