Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1857, octavo, tome 15.djvu/26

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signé avant la promotion sans aucune variation, et qu’il en fût remis un exemplaire authentique entre les mains d’Aldovrandi pour le lui envoyer. Il vouloit, de plus, recevoir par le duc de Parme des assurances précises de l’ouverture du tribunal de la nonciature après immédiatement la nouvelle de la promotion, et d’une pleine et entière satisfaction suivant les instructions qu’il avoit données à son nonce, qu’il avoit chargé, de plus, d’obtenir l’éloignement de quelques personnes notées à la cour de Rome : salaire trop accoutumé de la fidélité et de la capacité de ceux qui ont le mieux servi les rois contre les entreprises de cette dangereuse et implacable cour.

Malgré tant de dispositions apparentes, on soupçonnoit encore le pape de vouloir se préparer des délais, dans la crainte où il étoit du ressentiment de l’empereur. La flotte d’Espagne, si désirée du pape, partit enfin de Cadix, composée de douze vaisseaux de guerre, un pour hôpital, un pour les magasins, et deux brûlots. Albéroni flattoit toujours le pape qu’elle prenoit le plus court chemin du Levant, sans toucher aux côtes d’Italie, pour abréger de cent lieues. Albéroni, à ce qu’on a cru depuis, avoit averti le duc de Parme de la véritable destination de la flotte. Il l’avertit aussi d’éviter tout commerce avec les correspondants du Prétendant, dont la maison étoit toujours remplie de fripons et de traîtres, et duquel il blâmoit le voyage de Rome comme une curiosité dévote qui ne seroit pas applaudie en Angleterre. En même temps Albéroni, voulant tout mettre à profit pour plaire au pape dans cette crise de sa promotion, le pressoit de se faire obéir en France par quelque coup d’éclat sur la constitution.

Giudice, arrivé à Rome, y fut d’abord sèchement visité par Acquaviva ; on le soupçonnoit de se vouloir donner à l’empereur. Il étoit accusé d’en avoir fort avancé le traité, en 1714, avec le comte de Lamberg, ambassadeur de l’empereur, et de l’avoir brusquement rompu, lorsque la princesse