Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1857, octavo, tome 15.djvu/429

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la même déclaration que Monteléon avoit faite aux ministres de Georges, et d’informer en même temps cette compagnie de deux avantages nouveaux que le roi d’Espagne vouloit bien lui accorder pour le commerce. Mais les promesses non plus que les menaces ne furent pas capables d’apporter le moindre changement à la résolution prise sur l’escadre ; le nombre des vaisseaux en fut même augmenté et la diligence à l’armer. Toutefois Monteléon, malgré les ordres qu’il recevoit, espéroit du voyage de Nancré, persuadé que la France vouloit la paix et que c’étoit, en vain qu’Albéroni l’assuroit, même de sa main, que la négociation de Nancré seroit infructueuse. Monteléon ne pouvoit croire que l’Espagne fît la guerre quand elle seroit seule et que la France s’opposeroit à ses desseins. Il concluoit donc que lorsqu’Albéroni et Nancré se parleroient et qu’ils s’ouvriroient l’un à l’autre avec franchise, ils se concilieroient, et que la paix en seroit le fruit.

Cellamare, parfaitement persuadé de tout le contraire, avouoit que la difficulté venoit moins de la chose que de la disposition de la cour d’Espagne qui vouloit absolument la guerre pour ne pas laisser l’Italie dans les fers des Allemands, et multiplioit ses plaintes de ce que la France, buttée à vouloir demeurer en paix, manquoit une conjoncture si favorable d’abaisser la maison d’Autriche, et s’épuisoit en éloquence là-dessus. Stairs disoit à Paris que l’escadre passeroit dans la Méditerranée parce que l’Angleterre, étant garante des traités d’Utrecht et de la neutralité de l’Italie, ne pouvoit se dispenser d’agir quand ils étoient enfreints par le roi d’Espagne. Cellamare trouvoit que ce raisonnement étoit absolument contredit par la question alors agitée dans le parlement d’Angleterre, savoir si la garantie de la neutralité d’Italie de la part des Anglois subsistoit, ou si elle étoit absolument cessée ; même si la nation devoit avoir égard au traité d’alliance que le roi d’Angleterre avoit signé en dernier lieu avec l’empereur. Les discours et la conduite