Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1857, octavo, tome 15.djvu/441

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les autres États qu’il possédoit actuellement. La Pérouse, flatté de se trouver chargé d’une négociation sécrète avec le ministre de l’empereur à Londres, pendant que la négociation d’une paix générale occupoit toute l’attention publique, n’oublioit rien pour faire croire à son maître que la voie qu’il avoit ouverte pour négocier étoit la plus sûre et la meilleure qu’il pût trouver, et qu’il n’auroit pas même à craindre d’être traversé par les Anglois, quoique promoteurs du projet dont on attendoit les réponses de Vienne et de Madrid. Il s’appuyoit sur les assurances que Penterrieder lui avoit données, que tout le ministère anglois, sans en excepter ni Stanhope, ni Craggs, étoit entièrement dévoué à l’empereur ; que toutes les caresses faites à l’abbé Dubois étoient pures grimaces ; que l’escadre destinée pour la Méditerranée partiroit au plus tôt ; que déjà le consul anglois de Naples avoit ordre de faire préparer les provisions pour elle ; qu’il n’y avoit point à se mettre en peine des murmures de la nation anglaise ; qu’au fond, elle craignoit peu de rompre avec l’Espagne, parce que cette interruption ne pouvoit durer plus d’un an ; que, pendant cet espace de temps, il se formeroit des compagnies anglaises qui se dédommageroient dans les Indes espagnoles de la saisie que l’Espagne pourroit faire en Europe. Quelques armateurs même offroient à Penterrieder d’arborer le pavillon de l’empereur, et de faire des courses sur les Espagnols dans la Méditerranée, si ce prince vouloit leur donner des commissions.

Pendant que le ministre de l’empereur à Londres se croyoit si sûr non seulement des ministres de Georges, mais, encore des dispositions générales de la nation anglaise sur la guerre d’Espagne, l’ambassadeur d’Espagne à la Haye se tenoit également assuré de la disposition générale des Hollandois en faveur de son maître. Il crut en avoir une preuve dans la permission qu’il obtint à la fin de mars d’acheter les navires, de guerre que Castañeda devoit ramener