Pendant qu’Albéroni se disposoit à faire la guerre aux puissances temporelles de l’Europe, il ne ménageoit pas beaucoup la spirituelle du pape, et déclaroit hautement que Leurs Majestés Catholiques avoient autant de ressentiment qu’ils avoient de mépris de la conduite misérable que la cour de Rome avoit à leur égard dans la vue de ménager les Allemands. Albéroni, sous prétexte d’excuser le pape, disoit que le peu d’attention de Sa Sainteté pour Leurs Majestés Catholiques, et la complaisance qu’elle avoit pour leurs ennemis, procédoient des impertinences du cardinal Albane ; qu’il apprenoit même, par les lettres de Vienne, que c’étoit par les conseils de ce cardinal que le comte de Gallas avoit en dernier lieu bravé Sa Sainteté. Il ajouta que le roi d’Espagne avoit dessein d’envoyer enfin à Rome quelque esprit turbulent, quelque homme de caractère à parler fortement, soit qu’il fallût dire au cardinal Albane quatre mots à l’oreille, soit, qu’il convînt de découvrir au pape le manège que son neveu, conduit par un intérêt vil et sordide, pratiquoit avec les Allemands, manège indigne qui déconcertoit absolument les serviteurs de Sa Sainteté par les fausses démarches