Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1857, octavo, tome 15.djvu/5

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
Angleterre. — Son inquiétude sur le czar. — Troupes russiennes sortent du Mecklembourg. — Le Danemark, inquiet sur le nord, éprouve le mécontentement de la Russie. — Le czar veut traiter avec la France. — Obstacles du traité. — Le czar en mesure avec l’empereur à cause du czarowitz. — Plaintes et avis du roi de Prusse. — Offices du régent sur le nord. — Scélératesse du nonce Bentivoglio. — Le Prétendant à Rome ; y sert Albéroni. — Soupçons de nouveaux délais de sa promotion. — Hauteurs et manèges du pape. — Départ de Cadix de la flotte d’Espagne. — Scélératesse d’Albéroni. — Giudice à Rome. — Misère de sa conduite, de sa position, de sa réputation. — Friponnerie d’Ottobon. — Chiaous à Marseille. — Vie solitaire et pénitente de Ragotzi.


Le voyage du czar en France, au commencement de mai, devint l’attention de toute l’Europe, en particulier de l’Angleterre. Le roi de Prusse y seroit venu en même temps si on ne lui en eût fait craindre du ridicule, et que l’empereur n’en prit un violent ombrage. Ces deux princes étoient également mécontents du roi d’Angleterre, ils ne comptoient pas d’avoir rien à espérer de l’empereur. Leur vue étoit de conclure une paix avantageuse avec la Suède.

Le roi de Prusse sollicitoit le régent d’ordonner positivement au comte de La Marck, ambassadeur de France auprès du roi de Suède, d’engager promptement une négociation pour la paix entre eux et d’en poursuivre vivement la conclusion. Il insistoit à profiter de la guerre du Turc, dont l’empereur ne seroit pas plutôt débarrassé qu’il voudroit agir en maître des affaires de l’empire et de celles du nord, où il prendroit des liaisons préjudiciables à la France. Il avertissoit le régent de se défier de Georges tout occupé de ménager l’empereur à cause de ses États d’Allemagne, et de ceux qu’il avoit usurpés sur la Suède, et à qui il vouloit faire torcher deux cent cinquante mille livres sterling, que le parlement alloit lever pour le payement des arrérages dus aux alliés de l’Angleterre et des subsides de la dernière guerre. Irrité d’être frustré de sa part sur cette somme, il désiroit prendre avec la France des engagements plus forts