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Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1857, octavo, tome 15.djvu/57

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avoir des temps difficiles où la faiblesse du guet est un grand inconvénient, et où de l’augmenter en est un autre qui marque de la crainte et enhardit ceux qui se proposent d’en donner, et dans d’autres temps où il vient un dauphin, une dauphine et des fils de France qui n’ont pas encore leur maison, le guet, au nombre qu’il est, et qui ne peut être plus fort par rapport à la force des compagnies, ne peut suffire au service, et n’y suffisoit même pas par cette raison du temps du feu roi, qu’il étoit plus nombreux, parce que les compagnies étoient plus nombreuses. Il en arriveroit une augmentation d’escadrons de gardes du corps pour la guerre, qui répareroient en grande partie et bien moins chèrement ceux des gens d’armes, chevau-légers, mousquetaires et gendarmerie, dont le service seroit sans embarras et se feroit bien mieux, étant d’un même corps.

Enfin on éviteroit, en réformant les mousquetaires, d’autres inconvénients qui n’y sont compensés d’aucun avantage. On en a voulu faire une école militaire, et y faire passer sans exception toute la jeunesse qui demande de l’emploi. Or, cette école n’apprend rien pour la guerre ni pour la discipline des troupes ; on n’y apprend que l’exercice et à escadronner, à obéir, et force pédanteries, dont on se moque tout bas en attendant qu’on en sorte et qu’on puisse en rire tout haut. Ainsi cette jeunesse passe le temps d’une année au moins, et souvent davantage, à se débaucher dans Paris et à y dépenser très inutilement ; et quand elle entre dans les troupes, elle y est neuve à tout, comme si elle sortoit de sa province, et c’est alors qu’elle commence à apprendre utilement et qu’elle oublie tout ce qu’elle a appris d’inutile. Les détachements qui vont à la guerre ne l’instruisent pas davantage. Ils y servent en simples maîtres, ou, s’il y a des attaques à un siège, en simples grenadiers. Or la jeunesse noble, beaucoup moins l’illustre, qui est à la vérité destinée à la guerre et à tous ses hasards, ne l’est pas à ce genre de service ; et c’est en abuser d’une façon barbare