Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1857, octavo, tome 15.djvu/78

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à Londres, avec des menaces de le faire arrêter s’il traversoit en Italie des pays occupés par ses troupes. Peterborough reçut une réprimande et avis d’éviter d’entrer dans les États de l’empereur. Ce prince informa ses ministres en France des propositions qu’il recevoit de l’Angleterre pour conserver, disoit-il, la paix universelle dans l’Europe, et former une amitié plus étroite avec le régent. Mais l’avis qu’il en donna, vers le mois de juillet, au comte de Koenigseck, son ambassadeur à Paris, n’étoit que général. Il lui apprenoit seulement que la cour d’Angleterre attendoit de nouveaux avis de Paris ; qu’elle ne vouloit rien proposer que sur un fondement solide ; qu’elle avoit cependant laissé entendre que, si là cour de Madrid étoit trop difficile, l’ouvrage s’achèveroit avec le régent à l’exclusion de l’Espagne. L’empereur ordonnoit de plus à Koenigseck des assurances agréables d’entretenir avec Stairs une intelligence étroite.

Koenigseck se persuadoit assez que le régent n’avoit nulle part à l’entreprise de Sardaigne, et qu’il verroit avec peine une occasion de renouveler la guerre. Cependant il ne pouvoit croire qu’il n’en eût pas été informé avant l’exécution. Il étoit vrai pourtant que le régent n’en avoit eu nulle connoissance. On ne croyoit pas qu’aucun prince d’Italie, non pas même le duc de Parme, eût eu part au secret si bien gardé par Albéroni. Au moins l’ignoroit-il au commencement de juillet, qu’il conseilloit au roi d’Espagne de tenir parole au pape sur l’envoi et la destination de sa flotte. Il l’exhortoit en même temps à donner quelques marques de ressentiment de la détention de Molinez, qui étoit une telle infraction au droit des gens, qu’elle ne pouvoit être passée sous silence, mais d’y employer des paroles, non les armes ; de s’adresser aux garants de la neutralité de l’Italie, et d’exciter les autres princes de l’Europe à prendre des mesures contre les desseins de l’empereur, qu’il montroit assez, d’usurper le souverain domaine de toute l’Italie.

Ce prince s’étendoit à remontrer le danger de laisser l’Italie