Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1857, octavo, tome 15.djvu/91

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nommer l’auteur d’un conseil dont Albéroni vouloit se défendre. Sur sa parole Aldovrandi répandit que c’étoit le conseil d’État dont l’emportement avoit été extrême. Sur la même foi, que ce nonce prétendoit très sincère, il donnoit les Hollandois pour favoriser sous main l’entreprise, pour occuper l’empereur loin des Pays-Bas.

L’Angleterre ne laissoit pas seulement soupçonner ses intentions. Ses embarras domestiques faisoient juger que son intérêt la portoit à voir avec beaucoup de peine l’Europe prête à s’embraser de nouveau.

Pour la France, elle s’étoit expliquée. Le duc de Saint-Aignan avoit représenté que le roi, garant de la neutralité d’Italie, ne pouvoit approuver une entreprise qui y contrevenoit. Il avoit excité le nonce de solliciter le pape d’employer les offices de père commun ; enfin il avoit essayé de toucher par la fâcheuse situation du duc de Parme, à qui l’empereur demandoit hautement de fortes contributions. Ce prince manquoit d’argent. Il avoit inutilement recours à l’Espagne, qu’il exhortoit toujours, et avec aussi peu de succès, de donner au pape la dernière satisfaction qu’il désiroit, sur le livre du duc d’Uzeda dont on a parlé. Del Maro ne cessoit d’avertir son maître que l’entreprise regardoit la Sicile ; et les ministres d’Angleterre, de Hollande et de Venise à Madrid, s’épuisoient en inquiétudes et en raisonnements.