Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1858, octavo, tome 17.djvu/33

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régent eut de l’union avec M. le Duc ; l’opiniâtreté de M. le Duc à ne plus laisser échapper la surintendance de l’éducation du roi et qui sentit ses forces en cette occasion après tant de fois que M. le duc d’Orléans lui avoit donné et manqué de paroles les plus positives là-dessus ; ces intérêts divers, mais alors réunis de ces deux princes, chacun pour son but, l’emportèrent sur les plus sages considérations. Le favorable succès me combla de joie, et le délicieux fruit du rang que j’en recueillis me fut d’autant plus précieux que ce grand objet ne me séduisit ni l’esprit ni le cœur, et que je le pus goûter avec toute la paix qu’une conscience pure répand dans l’âme d’un homme de bien qui a sincèrement préféré l’État à soi-même.

Pour achever un morceau si curieux de l’histoire de cette régence, il faut dire pourquoi je ne crus pas à propos de profiter de cette occasion pour le bonnet. Je crus qu’il ne falloit pas surcharger la faiblesse du régent de tant de choses à la fois et ne pas embarrasser l’affaire si principale de la réduction des bâtards au rang de leurs pairies, dont il falloit presque abandonner l’espérance, si nous ne l’obtenions pas à l’occasion du changement de main de l’éducation ; ne l’embarrasser pas, dis-je, d’une autre affaire si inférieure à celle-là. Je pensai que le bonnet étoit une affaire si ridicule en soi du côté des bonnets, et si entamée, qu’il étoit impossible, que, près ou loin, une chose si juste nous fût refusée, et qu’il étoit même peu décent pour nous de ne l’obtenir que comme une vengeance du régent dont nous profiterions. Je craignis que le parlement, outré de l’affront qu’il alloit recevoir, uni avec le duc du Maine enragé de sa chute, et que l’éclat commun resserroit de plus en plus, se portât à des extrémités dont le monde ne manqueroit pas de nous charger, si notre intérêt devenoit une des amertumes de cette compagnie. Je sentis toute la différence pour la solidité d’un avantage tel que la réduction des bâtards au rang de leurs pairies, qui auroit M. le Duc pour