Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1858, octavo, tome 17.djvu/376

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dans le cabinet de Mme du Maine, inaccessible à tous autres de leur confidence, à qui il ne parloit que par la duchesse du Maine : ainsi, ni papiers ni dépositions à craindre. Ainsi, quand elle eut parlé, avoué, raconté, Laval aussi de rage de ce qu’elle avoit dit, et peu d’autres ; le duc du Maine, à qui cela fut communiqué à Dourlens, s’exclama contre sa femme, dit rage de sa folie et de sa félonie, du malheur d’avoir une femme capable de conspirer, et assez hardie pour le mettre de tout sans lui en avoir jamais parlé, le faire criminel sans qu’il le fût le moins du monde, et si fort hors de tout soupçon des menées de sa femme, qu’il étoit resté hors d’état de les arrêter, de lui imposer, d’avertir même M. le duc d’Orléans s’il eût trouvé les choses poussées au point de le devoir faire. Dès lors le duc du Maine ne voulut plus ouïr parler d’une femme qui à son insu avoit jeté lui et ses enfants dans cet abîme, et quand, à leur sortie de prison, il leur fut permis de s’écrire et de s’envoyer visiter, il ne voulut rien recevoir de sa part, ni lui donner aucun signe de vie. Mme du Maine s’affligeoit en apparence du traitement qu’elle en recevoit, en avouant toutefois combien elle étoit coupable envers lui de l’avoir engagé à son insu et trompé de la sorte. Ils en étoient là ensemble quand on les rapprocha de Paris. Le duc du Maine alla demeurer à Clagny, château bâti autrefois tout près de Versailles pour Mme de Montespan, et Mme du Maine à Sceaux. Ils virent ensuite M. le duc d’Orléans séparément sans coucher à Paris, où ils soutinrent chacun leur personnage, et comme l’abbé Dubois avoit jugé que le temps étoit venu de se donner auprès d’eux le mérite de finir leur disgrâce, tout fut bon auprès de M. le duc d’Orléans qui voulut bien leur paroître persuadé de l’ignorance du duc du Maine. Pendant leur séjour en ces deux maisons de campagne où ils ne virent que fort peu de gens, Mme du Maine se donna pour faire diverses tentatives auprès du duc du Maine, et lui pour les rebuter. Cette farce dura depuis le mois de janvier qu’ils arrivèrent à Sceaux et à Clagny, jusque