leur répondit que l’infamie étoit dans le crime et non dans le supplice. Ils le pressèrent sur l’honneur que cette maison avoit de lui appartenir à lui-même. « Eh bien, messieurs, leur dit-il, fort bien ; j’en partagerai la honte avec vous. »
Le procès n’étoit ni long ni difficile. Law et l’abbé Dubois, si intéressés à la sûreté des agioteurs, sans laquelle le papier tomboit tout court et sans ressource, prirent fait et cause auprès de M. le duc d’Orléans, pour le rendre inexorable ; et lui pour éviter la persécution qu’il essuyoit sans cesse pour faire grâce, eux dans la crainte qu’il ne s’y laissât enfin aller, n’oublièrent rien pour presser le parlement de juger ; l’affaire alloit grand train, et n’alloit à rien moins qu’à la roue. Les parents, hors d’espoir de sauver le criminel, ne pensèrent plus qu’à obtenir une commutation de peine. Quelques-uns d’eux me vinrent trouver, pour m’engager de les y servir, quoique je n’aie point de parenté avec la maison de Horn ; ils m’expliquèrent que la roue mettroit au désespoir toute cette maison, et tout ce qui tenoit à elle, dans les Pays-Bas et en Allemagne, parce qu’il y avoit en ces pays-là une grande et très importante différence entre les supplices des personnes de qualité qui avoient commis des crimes ; que la tête tranchée n’influoit rien sur la famille de l’exécuté, mais que la roue y infligeoit une telle infamie, que les oncles, les tantes, les frères et soeurs, et les trois premières générations suivantes, étoient exclus d’entrer dans aucun noble chapitre, [ce] qui, outre la honte, étoit une privation très dommageable, et qui empêchoit la décharge, l’établissement et les espérances de la famille, pour parvenir aux abbayes de chanoinesses, et aux évêchés souverains ; cette raison me toucha, et je leur promis de la représenter de mon mieux à M. le duc d’Orléans, mais sans m’engager en rien au delà pour la grâce.
J’allois partir pour la Ferté, y profiter du loisir de la semaine sainte. J’allai donc trouver M. le duc d’Orléans, à qui