Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1858, octavo, tome 19.djvu/144

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Dubois un verbiage où je me répandis avec profusion en reconnoissance, et où je lui fis accroire que ce n’étoit qu’à ces deux lettres non présentées, mais toutefois lues par Grimaldo à Leurs Majestés Catholiques, que je devois les grâces que j’en avois reçues, dès le jour même qu’elles avoient été informées par cette lecture du désir de son Altesse Royale et des siens. L’affaire étoit faite ; comme que ce fût, je lui en donnois l’honneur. Faute de pouvoir pis, il prit le tout en bonne part, me félicita, et se donna pour fort aise d’avoir si heureusement travaillé en ma faveur.

Pour l’y confirmer en même temps, je lui avois demandé des lettres de remerciements de ces grâces de M. le duc d’Orléans au roi d’Espagne, et de lui au marquis de Grimaldo et au P. Daubenton. Comme il ne s’agissoit plus de me les procurer, mais d’en remercier comme de l’accomplissement d’un ouvrage qu’il lui plaisoit de s’approprier, j’eus ces lettres en réponse des miennes, dont le style animé étoit bien différent de la langueur de celui des deux lettres de prétendue demande, qu’il m’avoit fait attendre si longtemps, et qui, de l’avis de Grimaldo, restèrent dans mes portefeuilles. Sa réponse à moi, glissant sur la retenue des deux lettres, fut le compliment de conjouissance le plus vif du succès de ce qu’il m’insinuoit doucement être son ouvrage ; et la lettre qu’il fit de M. le duc d’Orléans se ressentit du même style. Je tenois mon affaire et j’en fus content.

Je rendis compte au cardinal, en lui mandant les grâces que je venois de recevoir, qu’il falloit un parrain pour la couverture de mon second fils, et pour la Toison de l’aîné, et des raisons qui me les avoient fait choisir. Au sortir de table à Lerma, de chez le duc del Arco, je le priai de vouloir faire cet honneur à mon second fils, et il l’accepta de façon à me persuader qu’il s’en trouvoit flatté, et en même temps je priai le duc de Liria de vouloir bien l’être de l’aîné pour la Toison : je ne pouvois moins pour lui. Il se réputoit François ; il étoit fils aîné du duc de Berwick, que M. le duc