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POÉSIES


Le lierre, après la neige blanche,
Reparaît aux crêtes des murs ;
Point de feuille, au bois, sur la branche ;
Mais le suc en bourgeons s’épanche,
Et les rameaux sont déjà mûrs.

Le sol rend l’onde qu’il recèle ;
Et le torrent longtemps glacé
Au front des collines ruisselle,
Comme des pleurs aux yeux de celle
Dont le désespoir a passé.

Oiseaux, ne chantez pas l’aurore,
L’aurore du printemps béni ;
Fleurs, ne vous pressez pas d’éclore :
Février a des jours encore,
Oh ! non, l’hiver n’est pas fini.




Ainsi, dans l’humaine vieillesse,
Non loin de l’éternel retour,
La brume par moments nous laisse,
Et notre œil, malgré sa faiblesse,
Entrevoit comme un nouveau jour :

Étincelle pâle et lointaine
De soleils plus beaux et meilleurs,
Reflet de l’ardente fontaine,
Aurore vague, mais certaine,
Du printemps qui commence ailleurs !