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DE JOSEPH DELORME.


Pierre Lebrun, dont le style chaud et franc, est bien supérieur à celui de son homonyme, tout blasonné de mythologie et de majuscules[1], dit au second chant de son Voyage en Grèce :


. . . . . . . . . . . . Les platanes épais
Près des sources encor se plaisent à s’étendre
En dômes transparents ; leurs rameaux n’ont jamais
Sur la terre laissé tomber un jour plus tendre.


Barthélemy et Méry, au second chant du dernier et du plus beau de leurs poëmes :

Aux premières lueurs de l’aube, sur la rive,
Épuisé de sa course un messager arrive.


Alfred de Vigny, dans la Dryade :

Ida ! j’adore Ida, la légère bacchante :
Ses cheveux noirs, mêlés de grappes et d’acanthe,
Sur le tigre attaché par une agrafe d’or,
Roulent abandonnés ; sa bouche rit encor
En chantant Évoé ; sa démarche chancelle ;
Ses pieds nus, ses genoux que la robe décèle,
S’élancent ; et son œil, de feux étincelant,
Brille comme Phœbus sous le signe brûlant.


Al. Soumet, qui est souvent de l’école de Racine, s’en sépare lorsqu’il dit :

Oui, disait l’une, c’est notre douce patronne.
La sainte du berceau, l’ange des cœurs souffrants,
Oh ! venez sous mon toit guérir mes vieux parents
Qui sont malades. — L’autre en souriant la prie, etc.


Moi-même, s’il est permis de me citer après de tels noms sur une question de fait, trouverai-je chez Racine des exemples qui me justifieraient d’avoir écrit :

  1. On a été plus juste ailleurs envers Le Brun le pindarique ; mais il est très-sensible, en cet endroit, que Joseph Delorme cherchait à rallier et rattacher à la cause de la rénovation poétique le plus de partisans et d’autorités possible parmi les poètes contemporains distingués.