Pour moi, comme un fardeau, d’hésiter à lui dire
Mon cœur et ses combats ;
De moins souvent mêler mon haleine à la sienne,
Et le soir, à l’abri du monde et des rivaux,
De n’oser éclairer sa tendresse ancienne
À des rayons nouveaux !
Pour moi de ne plus lire à sa face pâlie
Les signes orageux d’un céleste avenir !
Pour Elle les trésors de la mélancolie,
La paix du souvenir ;
Le bonheur souverain de gouverner une âme,
De la sentir, à soi, muette, à son côté :
Des gazons sous ses pas, et son pur front de femme
Dans la sérénité ;
Un sommeil sans remords avec l’essaim fidèle
Et les songes légers d’un amour sans effroi !
Amour ! abeille d’or ! ô tout le miel pour Elle,
Et l’aiguillon pour moi !
III
Mon âme est ce lac même où le soleil qui penche,
Par un beau soir d’automne, envoie un feu mourant :
Le flot frissonne à peine, et pas une aile blanche,
Pas une rame au loin n’y joue en l’effleurant.