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POÉSIES


Si je veux décrire un ombrage,
Je ne sais plus les noms des fleurs ;
Oiseaux et fleurs, brillant ramage,
Ne sont qu’indistinctes couleurs.

Pour chanter la nature absente,
Qui dans son lointain m’a souri,
Pour rendre à ma voix qui la chante
Un peu de ce savoir fleuri,

En des vers que le Soir inspire,
Je veux m’essayer, appuyé
Au pur ébène de ta lyre,
Charmant Collins, presque oublié !


ODE AU SOIR

imité de collins[1].


Si quelque flûte de Sicile,
Quelque note d’un buis docile,
Te peut, ô chaste Soir, espérer arriver,
Parmi les bruits de tes haleines
Si fraiches en mourant, et le chant des fontaines
Qui monte à l’heure du rêver ;

  1. Le poëte a cherché dans cette imitation à rendre surtout la couleur et le mouvement rhythmique de l’original. Il aurait à demander pardon pour certaines hardiesses que réclamait la fantaisie de l’inspiration et queles puristes ont reprochées dans le temps au poëte anglais lui-même. C’est pourtant grâce à ces vives nouveautés, soutenues d’un sentiment doux et vrai, que l’Ode de Collins est restée unique et qu’elle mérite à jamais de vivre.