Aller au contenu

Page:Sainte-Beuve - Poésies 1863.djvu/573

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
251
PENSÉES D’AOÛT.

Il est entré tout droit, et nous est arrivé.
Il s’assied, il écoute : « Oh ! d’Atys énervé,
De Bérénice en astre, ou des pleurs d’Ariane,
Qu’est-ce donc ? se dit-il, la thèse est bien profane ! »
Mais il n’a pas plus tôt ouï deux traits charmants :
« Peste ! le Welche encore a du bon par moments ! »
Il goûte, en souriant, cette pure parole,
Ce ton juste et senti, non pédant, non frivole,
Cette culture enfin d’un agréable esprit,
Qui du travail d’hier chaque jour se nourrit,
Comme une plate-bande, une couche exposée
Qu’ont pétrie à loisir soleil, pluie et rosée.

L’honnête liberté de cet enseignement,
Cette facilité de tourner décemment,
D’affronter sans effroi, sans lâche complaisance,
L’impureté latine et sa rude licence,
Le frappent : rien qu’à voir le maître ainsi placé,
Il sent qu’un changement sur le monde a passé.

Catulle, il l’a peu lu ; mais, comme toutes choses,
Dans l’ensemble il le sent, d’après les moindres doses,
Il admire comment aux écrits anciens,
Que trop à la légère il traitait dans les siens,
On peut lire en détail et gloser avec grâce,
Et tirer maint secret pour un art qui s’efface.
Il se dit que lui-même et son vers si hâté
Supporteraient bien peu cette sévérité.
Il repense à Racine, à la forme sacrée,
Égale au sentiment, lui donnant la durée,
Par qui tous les vrais purs sont au même vallon,
Et qui faisait Catulle aimé de Fénelon.

Ainsi le grand témoin qu’à plaisir je te donne,