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NOTES ET SONNETS.


Oiseau, pourquoi cette allégresse,
Orgueil et délices des nuits ?
Ah ! ce ne sont plus mes ennuis,
Que ceux où ton chant s’intéresse !

Soupir, espoir, tendre langueur,
Attente sous l’ombre étoilée !
Par degrés la lune éveillée
Emplit en silence le cœur.

Pour qui donc fleurissent ces roses,
Si ce n’est pas pour les offrir ?
Charmant rayon, autant mourir,
Sans un doux front où tu te poses !

Tous les ruisseaux avec leurs voix
Que sont-ils sans la voix qu’on aime ?
Ce ne fut jamais pour lui-même
Que j’aimai l’ombrage des bois.

Dans les jardins ou les prairies,
Le long des huis ou des sureaux,
Devant l’ogive aux noire barreaux,
Comme au vieux chêne des féeries ;

Même sous l’orgue solennel,
Au seuil de la chaste lumière,
Même aux abords du sanctuaire
Où toi, tu t’es choisi le ciel,

Dès l’enfance mon seul génie
Ne poursuivit qu’un seul désir :
Un seul jour l’ai-je pu saisir ?
Mais tout vieillit, l’âme est punie.