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PORT-ROYAL.

tout avec le reste de sa famille qu’il le lia sans plus tarder.

On a les premières lettres que M. de Saint-Cyran écrivit à M. d’Andilly après leurs entretiens de Poitiers. Les brouillons en furent saisis chez l’abbé lors de son arrestation, et les Jésuites les ont fait imprimer[1]. Le rôle du futur directeur s’y dessine avec assez d’évidence et mieux que son talent d’expression, qui s’y trouve encore des plus incroyablement embrouillés : mais le caractère se pose déjà. À l’impétuosité de M. d’Andilly on voit qu’il ne répondit d’abord qu’avec une sorte de lenteur et même de froideur, comme pour l’exciter. Ce fut au point que M. d’Andilly en fit quelque plainte à M. de Bérulle, lié avec tous deux. M. de Saint-Cyran répare ce premier calcul raffiné, par une interminable lettre du 25 septembre 1620, écrite tout d’une traite, dit-il, et comme s’il eût voulu répandre l'encre sur le papier : il a certes réussi à y noyer sa pensée dans la plus noire quintessence. En général, une partie de cette obscurité aussi est voulue. À propos d’un projet de voyage à Paris (9 mai 1624), on lit :

    7 janvier 1621, on lit : «J’ai reçu la lettre de M. de Saint-Cyran avec une satisfaction qui ne se peut dire. Je vous remercie de tout mon cœur de m’avoir procuré le bonheur d’une si sainte amitié…» Le bonhomme Guilbert, qui, dans ses Mémoires historiques et chronologiques sur Port-Royal, ne laisse rien passer, discute très au long (tome II, page 164) la date juste de la première visite de M. de Saint-Cyran à Port-Royal des Champs. Une lettre de ce dernier à M. d’Andilly, du 8 août 1621, montre qu’il y était allé à cette époque, mais pour voir madame Arnauld. Une lettre de la mère Angélique à M. d’Andilly, du 2 novembre 1624, parle du bonheur que lui avait causé une visite de M. de Saint-Cyran, comme s’il en avait déjà fait quelques-unes.

  1. Le Progrès du Jansénisme découvert, par le sieur de Préville, 1655, in-4o, pages 122 et suiv. Il faut faire, dans l’inintelligible de ces lettres, la part des fautes d’impression que la malice des éditeurs ne s’est en rien appliquée à diminuer.