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PORT-ROYAL.

nom, et le séminaire qui s’y était ajouté, avaient pour fondateur M. Bourdoise.

M. Adrien Bourdoise, parmi les simples, est une des figures les plus dignes d’être notées dans l’histoire de la renaissance religieuse au commencement du dix-septième siècle. Né dans le diocèse de Chartres en 1584, et orphelin de bonne heure, il passa dans son enfance par toutes sortes de métiers, et la plupart assez bas : gardien de troupeaux, petit clerc de procureur, laquais même, portier de collège, le pauvre jeune homme fit un peu de tout ; mais, à travers tout, il conservait et développait en son cœur une ferveur de piété très vive, se servant, pour s’instruire aux choses de Dieu, des moindres circonstances qui se présentaient. Il conçut, dès sa tendre enfance, une très-haute idée de ce qu’était, de ce que devait être un ecclésiastique, un clerc ; et, voyant en quel état de désordre et de déconsidération, après la Ligue, la Clèricature (comme il disait) était tombée, il se voua à tout faire pour la relever tant en elle-même que dans l’opinion du peuple. C’était un homme d’admirable zèle et d’effusion bien plutôt que de pensée et d’intelligence ; il se prit donc un peu aux dehors ; mais sa grande charité et piété lui devenaient au besoin lumière. Tout jeune encore, par le soin qu’il avait des églises près desquelles il se trouvait, par son dévouement aux intérêts des paroisses, au service des curés, même à la nourriture des pauvres ecclésiastiques pour lesquels il retranchait sur son nécessaire, on l’avait surnommé le solliciteur clérical universel, ou encore le marguillier universel[1]. Son idée fixe était d’amener les prêtres à

  1. Plus tard, Camus, le rehaussant, l’appelait le théologien, parce qu’il ne parlait que de Dieu et de son culte. Comme pendant de la Vie de M. Bourdoise (1714, in-4o), on peut lire la Vie de Claude Bernard, surnommé le pauvre Prêtre, autre saint de ce temps-là ; Camus l’a écrite dans un livre des plus vifs et des plus