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APPENDICE.


L’ACADÉMIE DE LAUSANNE EN 1837.

(Se rapporte à la page 1 et 5.)

Le temps, à la longue, donne quelque intérêt — un intérêt biographique, sinon littéraire — à des choses qui, plus rapprochées, n’avaient de valeur que pour nous. Il est bon aussi de fixer les particularités vraies, ne fût-ce que pour empêcher les fausses de s’y substituer et de prévaloir. J’étais allé faire pour la première fois, ai-je dit, un voyage en Suisse dans l’été de 1837. Je savais, en passant à Lausanne, que j’y avais un ami dans la personne de M. Juste Olivier, poète de la jeune école, et que j’avais vu à Paris en 1829-30. Accueilli avec cordialité par lui et par sa femme, poète elle-même, je ne tardai pas, dans la conversation, à exprimer un regret : c’était de ne pouvoir, dans ma vie de Paris morcelée, un peu dissipée et assujettie à des besognes journalières, trouver une année d’entier loisir po-iic produire et mener à fin ou mettre du moins en pleine voie d’exécution le projet que je nourrissais depuis longtemps d’une histoire de Port-Royal. J’étais réellement seul, alors, à m’occuper d’un pareil sujet. J’y avais été conduit par mon goût poétique pour les existences cachées et par le courant d’inspiration religieuse que j’avais suivie dans les Consolations. Mes amis saisirent ma parole au vol : ils avaient des relations intimes dans le Conseil de l’Instruction publique et dans le Conseil d’État. Je fus tout surpris lorsque, deux ou trois jours après ma première conversation, ils me demandèrent si, au cas où l’on m’offrirait de faire dans l’Académie de Lausanne un Cours d’une année sur Port-Royal, j’accepterais. J’acceptai avec gratitude. Je revins deux mois après, vers le milieu de l’automne, avec toute ma collection de livres jansénistes ; je m’enfermai, ne voyant jamais personne jusqu’à quatre heures du soir les jours où je ne