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PORT-ROYAL.

Royal des Champs lors de la première dispersion de 1638 ; il tomba malade en revenant à Paris. Sa complexion était très-délicate. Guéri, il travailla avec M. de Barcos dans la maison de M. de Saint-Cyran alors prisonnier. Plus tard M. de Barcos lui procura M. Guillebert pour lui enseigner les questions de l’école en le dispensant de la Sorbonne. Quand M. Arnauld fut caché par suite du livre de la Fréquente Communion, on lui donna M. de Saci pour compagnon et aide dans sa retraite. On voit donc très-bien comment en M. de Saci se combinent l’esprit direct de Saint-Cyran par M. de Barcos, par M. Singlin, et en même temps l’esprit d’Arnauld par le sang et par cette collaboration intime. On a dès l’abord une preuve de sa maturité morale dans une lettre à M. Le Maître, à qui il envoyait quelques cahiers d’Arnauld : « Prenez garde, mon très-cher frère, à tous ces termes un peu durs. Il dit par exemple en un endroit : N’est-ce pas un abus intolérable… ? Pourquoi ne met-on pas plutôt déplorable, puisque nous pourrions y être enveloppés comme les autres ?… Il faut aussi considérer que mon oncle a paru un peu chaud lorsqu’il étoit sur les bancs. Quelques-uns l’ont regardé comme un esprit de feu, et ont craint qu’il ne fût un peu aigre, quoiqu’il ne le soit nullement, et qu’il soit l’homme du monde qui ait le moins de fiel. Mais il faut ôter tout prétexte, et combattre aussi bien les imaginations des hommes que leurs erreurs. » Ainsi la nature prudente de M. de Saci n’était pas sans quelque méfiance de la nature pugnace d’Arnauld, et il l’aurait voulu tempérer. Mais il faut remarquer que cela tombe ici sur la diction, et qu’en général cette justesse de critique, à l’égard d’Arnauld et des autres, ne porta guère jamais que sur des détails, non sur l’ensemble de la conduite et sur l’esprit général du rôle. Lui-même, M. de Saci, contribua un instant