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LIVRE TROISIÈME.

propositions, comme s’il eût voulu rebuter tous ceux dont il pouvoit espérer quelque secours. »

Saint-Gilles s’en retourna en France sans obtenir du Cardinal autre chose qu’un chiffre (pour correspondre), qui était la conclusion ordinaire des négociations qui se faisaient avec lui. — On a, dans ces différents textes, la mesure bien précise de la liaison de Retz et des Jansénistes. Ces derniers, tout négligés qu’ils étaient, ne continuèrent pas moins de lui prêter leur plume, et de le faire parler jusqu’au bout dans le plus digne langage métropolitain : « Je ne sais si vous avez eu connoissance en votre solitude, écrivait le jeune Racine à l’abbé Le Vasseur (5 septembre 1660), de quelques Lettres qui font un étrange bruit. C’est de M. le cardinal de Retz. Je les ai vues, mais c’étoit en des mains dont je ne pouvois pas les tirer. Jamais on n’a rien vu de plus beau, à ce qu’on dit. » Tout cela se termina donc par des phrases. Celles-ci du moins avaient assez grand air, et sauvaient aux yeux du public la misère du fond. Grâce aux Jansénistes, le cardinal de Retz eut, comme archevêque, son chant du cygne[1].

Marguerite Périer, l’objet du miracle de la Sainte-Épine, vécut de longues années retirée à Clermont au sein de sa famille, dont elle resta la dernière ; elle ne se maria point, et c’est bien d’elle que Pascal aurait pu dire avec raison ce qui a paru exagéré par rapport à la sœur de Marguerite, que c’eût été une sorte de déicide en sa personne que le mariage[2]. Elle demeura ainsi

  1. Voir à l’Appendice un vraiment dernier mot sur Retz
  2. Mais pour cette sœur de Marguerite elle-même, comment ceux qui se sont tant récriés sur le bout de lettre de Pascal, ne sont-ils pas mieux entrés dans l’esprit des choses et n’ont-ils pas senti la connexion ? Quoi ! la famille Périer est l’objet d’une faveur unique d’en haut, d’un miracle (car il faut partir de là) : et trois ans après, en 1659, on pense à marier à la première occasion,