Page:Sainte-Beuve - Port-Royal, t3, 1878.djvu/225

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
215
LIVRE TROISIÈME.

relâchée. De ce côté, pour Pascal, le gain de cause est assez complet, ce semble, et il suffirait d’entendre les tempêtes de M. de Maistre à ce propos pour n’en pas douter[1].

Il est vrai que cette Assemblée de 1700, en atteignant aussi quelques Propositions du dogme janséniste, fit et voulut faire œuvre de juste milieu ; mais le plus fort coup, et qui eut tout son retentissement, fut celui qui frappait sur la morale relâchée. C’est alors que Bossuet, au moment où il provoquait la censure de l’Assemblée en ce sens, s’avança jusqu’à dire : « Si, contre toute vraisemblance, et par des considérations que je ne veux ni supposer ni admettre, l’Assemblée se refusoit à prononcer un jugement digne de l’Église gallicane, seul j’élèverois la voix dans un si pressant danger ; seul je révélerois à toute la terre une si honteuse prévarication ; seul je publierois la censure de tant d’erreurs monstrueuses. » — C’est-à-dire, seul je reprendrais et pousserais l’œuvre des Provinciales, en vigilant Évêque que je suis.

Ainsi le pur dogme janséniste échoue ; cette haute reprise de l’idée de Grâce au pied de saint Augustin et de saint Paul n’est pas agréée, et un vague nuage de Semi-Pélagianisme (comme diraient les nôtres), ou tout au moins une rédaction prudente, enveloppe et sauve les embarras de l’Église catholique gallicane, qui se sent comme pressée à cet endroit entre Calvin, d’une part, et le bon sens déjà philosophique, de l’autre. Mais la réforme de Port-Royal dans la Pénitence est généralement admise ; mais, surtout la dénonciation morale contre les Casuistes ennemis obtient son plein effet ; les ordures des Casuistes, comme les appelle encore Bossuet, sont rejetées hors du temple ; les étables

  1. De l’Église gallicane, livre II, chap. xi.