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Page:Sainte-Beuve - Port-Royal, t3, 1878.djvu/383

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LIVRE TROISIÈME.

l’en devez remercier. Nous allons encore faire une revue, monsieur votre très-cher fils et moi, après laquelle il n’y aura plus rien à refaire ; et je crois que notre dessein ne vous déplaira pas, ni à M. Périer (que je salue ici avec votre permission), puisque nous ne faisons autre chose que de voir si l’on ne peut rien restituer des fragments que M. de Roannez a ôtés ; demain nous achèverons ce travail, s’il plaît à Dieu,… Envoyez-nous au plus tôt les cahiers de M. Pascal qui vous restent et qui nous manquent, et mandez-nous votre dernière volonté ; nous l’exécuterons très-ponctuellement… » (Et il indique les Pensées qui leur manquent, et qui furent en effet envoyées.)

Mais c’est dans une seconde lettre, écrite trois semaines après la première, qu’on saisit bien l’état des choses, et qu’on assiste, pour ainsi dire, à la fabrique intérieure de l’édition. La lettre est longue, pleine de redites ; mais quelques phrases qu’on en détacherait ne donneraient pas une idée exacte de la mesure de correction où l’on prétendait se tenir[1] :

« Ce 7 décembre 1668.
« Monsieur votre fils m’apporta hier votre lettre du 27e du mois passé, nous la lûmes ensemble et pesâmes plus toutes vos raisons que vous n’auriez pu faire vous-même, quand vous y auriez été présente pour répondre à nos objections. Il est certain que vous avez quelque raison, Madame, de ne vouloir pas qu’on change rien aux Pensées de monsieur votre frère. Sa mémoire m’est dans une si grande vénération, que, quand il n’y auroit que moi tout seul, je serois entièrement de votre avis, si M. de Roannez et ceux qui ont pris la peine de revoir ces fragments avoient prétendu substituer leurs pensées à la place de celles de notre saint, ou les changer de manière qu’on ne pût pas dire sans

  1. M. Faugère a publié cette lettre ainsi que la précédente (Édition des Pensées, tome I, page 390) d’après le manuscrit de Clermont ; je les connaissais, un peu moins correctes, d’après le manuscrit de la Bibliothèque du Roi cité dans mon tome II, page 380 (Suppl. franç., no 1485).