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PORT-ROYAL.

ramitié. » A Tégard des enfants, une chanté particulière le rabaissait jusqu’à eux avec une simplicité admirable. Il leur rendait raison de tout, même aux plus petits ; il ne leur imposait jamais par autorité. Mais écoutons ici, sans en rien perdre, son biographe lui-même :

a II leur disoit toujours quelque chose d’instructif, quand roccasion s’en présentoit. Il s’appliquoit surtout à leur donner une idée de leur âme, pour leur faire concevoir quelque chose de spirituel, et les élever par là à Dieu. Il tiroit des raisons et des comparaisons de tout ce qui se présentoit. Il demandoit quelquefois à de jeunes enfants qui gardoient des vaches, comment de si gros animaux se laissoient conduire par eux qui étoient si petits. Il tâchoit ensuite de leur faire comprendre par là qu’il falloit donc qu’il y eût en eux quelque chose de plus noble et de plus élevé qu’en ces bêtes, et que c’étoit leur âme ; qu’elle étoit plus excellente que le Soleil et que tout ce qu’il y a de plus beau au monde ; mais que le péché la défiguroit, et la rendoit plus difforme que les plus horribles bêtes : par oii il cherchoit à leur inspirer de l’horreur du péché. Et pour leur apprendre en partie ce que c’étoit, il leur disoit, en un mot, que c’étoit ce qu’ils ri’osoimt faire devant les personnes qu’ils craignoient. — Il aimoit leur simplicité, et révéroit en quelque sorte leur innocence. » Cette idée de l’enfance, d’après Tillemont, n’est pas contradictoire avec celle que M. de Saint-Cyran nous a montrée, non moins charitable, mais d’aspect plus sévère ; c’en est le correctif et le complément. Osons entrer plus avant dans ces détails, qui rappellent chez Tillemont l’aimable tendresse de saint François de Sales et celle des anciens Pères des déserts :

a II étoit bien aise, nous apprend son biographe, qu’on apportât les plus petits à la Messe, et il n’appréhendoit pas tant qu’on fait d’ordinaire, de les y entendre pleurer : « Leurs cris, disait-il après un saint Père, sont leurs prières, et des prières auxquelles Dieu n’est point insensible. » — Il auroit