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Page:Sainte-Beuve - Portraits contemporains, t1, 1869.djvu/206

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L’ABBÉ DE LA MENNAIS.

1832[1].

« Vous êtes à l’âge où l’on se décide ; plus tard on subit le joug de la destinée qu’on s’est faite, on gémit dans le tombeau qu’on s’est creusé, sans pouvoir en soulever la pierre. Ce qui s’use le plus vile en nous, c’est la volonté. Sachez donc vouloir une fois, vouloir fortement ; fixez votre vie flottante, et ne la laissez plus emporter à tous les souffles comme le brin d’herbe séchée. » Ce conseil donné quelque part à une âme malade par le prêtre illustre dont nous avons

  1. Sans doute ce portrait, écrit il y a quelques années, ne paraîtra déjà plus ressembler à l’illustre modèle, et pour nous-même nous avouerons qu’il ne nous satisfait que très-imparfaitement. Serait-ce changement inopiné dans le modèle ? n’était-ce pas plutôt illusion et précipitation dans le peintre ? Quoi qu’il en soit, M. de La Mennais, à nos yeux, n’est plus l’homme qui se distinguait entre tous ceux du siècle par un caractère singulier d’autorité et de foi ; il est beaucoup plus du siècle, beaucoup moins prêtre, et beaucoup plus écrivain et poëte que nous n’avions cru le voir. Mais si le trait principal que nous lui avions attribué s’est trouvé imaginaire, tant d’autres traits de vertu, d’ingénuité, de talent, nous paraissent et nous paraîtront toujours les mêmes dans cette respectable figure. Nous maintenons donc, ne serait-ce que comme point de comparaison, ce portrait qui a ressemblé un moment et dont bien des détails se vérifient encore. (Note de 1836.)