Page:Sainte-Beuve - Volupté.djvu/27

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Troyen adultère : Il n'est pas permis de repousser les aimables dons de Vénus, ; - pour moi qui de ces lâchetés idolâtres me relevais par courts accès, jusqu'à l'effort du cloître et aux aspérités du Calvaire ; qui ai donc éprouvé, dans ce désarroi chétif des puissances de l'âme, ce qui se ballotte en nous de monstrueusement contradictoire, ce qui s'y dépose au hasard de contagieux, d'impur, et d'où peut résulter notre perte, à mon Dieu ! je ne crois plus tant aux explications fastueuses des hommes ; je ne vais pas chercher bien haut, même dans les plus nobles cœurs, l'origine secrète de ces misères qu'on dissimule ou qu'on amplifie. Mais, sans trop presser, mon ami, ce qui serait la rougeur de bien des fronts, sans croire surtout dérober ses mystères à Celui qui seul sait sonder nos reins, je ne vous parlerai ici que de moi. A ce premier bouleversement chimérique que nul n'a jamais soupçonné, se rattachent le principe de mes erreurs et la trop longue déviation de ma vie. L'amour-propre fit honte dès lors à la docile simplicité, et, sans entreprendre de révolte en règle, il ne perdit aucune occasion de jeter en se jouant ses doutes comme des pierres capricieuses à travers l'ombrage révéré où s'était nourrie mon enfance. L'activité politique se substitua insensiblement chez moi à la piété, et mes rapports personnels avec les gentilshommes du pays m'initièrent aux tentatives de l'Emigration et des princes.

Ainsi j'allais me modifiant d'un tour rapide, par diversion à mon idée dominante ; et, quand cette espèce d'hystérie morale, qui dura bien un an en tout, fut dissipée, quand je reconnus, en riant aux éclats que j'avais cru en dupe à ma seule fantaisie, mon courant d'idées n'était déjà plus le même, et les impressions acquises me demeurèrent.