Page:Sainte-Beuve - Volupté.djvu/359

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avant la fin de cette semaine, il le faudra, nous nous quitterons.


J'avais été ordonné prêtre à la Trinité. De nouvelles relations se formaient autour de moi ; des devoirs immenses, dont j'appréciais l'étendue, bordaient de toutes parts ma route et y jetaient de fortes ombres. J'étais retourné un moment à Paris, après mon ordination. La dernière attache personnelle que j'y avais gardée n'existait plus ; madame de Cursy était morte à la fin du dernier hiver, depuis trois mois environ, sans que je l'eusse pu revoir, et le petit couvent, peuplé à peine de quelques religieuses très âgées et devenues infirmes, offrait une solitude veuve, dans laquelle la mort introduite n'allait plus cesser. Durant cette dernière année aussi, j'avais appris que mademoiselle de Liniers, cédant à la volonté de sa grand-mère au lit de mort, avait consenti enfin à accepter ce qu'on appelle un parti avantageux ; elle avait épousé une personne plus âgée qu'elle, mais de naissance et dans des fonctions élevées. Que je lui sus un gré sincère, ange de sacrifice, de cette obéissance à une mourante, et de cette résignation de son cœur ! Il me semblait y saisir, entre autres motifs pieux, un sentiment particulier de délicatesse qui s'efforçait de m'alléger un remords. Je n'avais eu, depuis bien des semaines, aucune nouvelle directe de Blois ; madame de Couaën allait, à ce que je craignais, s'affaiblissant de jour en jour, bien qu'avec des alternatives de mieux qui rappelaient l'espérance et dissimulaient le déclin. Après m'être présenté à Paris devant mes supérieurs ecclésiastiques, qui me marquèrent mille faveurs, je me décidai par plusieurs raisons à faire le voyage de Rome ; mais, avant de partir, j'eus un désir invincible de revoir le pays natal, la ferme de mon