Page:Sainte-Beuve - Volupté.djvu/383

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du jour et du soleil, tandis que l'âme sainte des morts a passé les fatigues et la peine. Et je priais, tout en marchant, pour celle dont l'esprit habitait si volontiers cette bruyère au temps de la terrestre patrie, et qui, planante et délivrée, y revenait en ce moment autour de nous.

A l'intérieur de la chapelle tout avait été préparé. On n'eut qu'à descendre le corps sous la dalle du milieu, dans une espèce de petit caveau, et la terre fut jetée dessus.

Mais, à cet aspect, les pleurs et les pensées m'assaillirent.

Avec l'agrément du recteur, je m'avançai au seuil, et devant les assistants en cercle, devant cette mer et ce ciel majestueux, non loin de la guérite en pierre, dans une langue à être compris de tous, je m'écriai :

« Vents de l'Ouest, soupirs de l'Océan, soufflez sans trop de colère, apportez quelquefois dans vos orages une brise qui soit celle de sa patrie !

« Flots de la mer, ne rongez plus si furieusement cette falaise et n'y renversez rien ! “ Alcyons, corneilles, goélands, oiseaux qui partez en automne pour les grandes rives, posez-vous ici dans vos rassemblements ; Dieu bénira votre traversée et fortifiera vos ailes !

« Vaisseaux, voiles en détresses, ayez confiance ; faites à Dieu, qu'aucun ne se brise plus à ce golfe hérissé, et que le phare qui va se dresser en ces lieux ne soit pas trompeur ! “ Mon Dieu qui êtes dans les vents, dans les flots, dans les éléments, qui présidez aux lois des choses et aux destinées des hommes, faites qu'il n'arrive rien que de bon, de clément et de béni, autour des restes mortels de celle si bonne et si éprouvée et si pénitente, pour le repos de laquelle nous vous prions ! ” Et, me retournant vers la foule, je la congédiai ; tous