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Page:Salluste, Jules César, C. Velléius Paterculus et A. Florus - Œuvres complètes, Nisard.djvu/709

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Cnæus, échappé du combat, blessé à la cuisse, et gagnant des lieux déserts et écartés, fut atteint, par Césonius, près de la ville de Laurone, se défendit en homme qui n’avait pas encore perdu toute espérance, et fut tué. Quant à Sextus, le fortune le cacha dans la Celtibérie et le réserva pour d’autres guerres après la mort de César.

César revint victorieux dans sa patrie ; il remporta son premier triomphe sur la Gaule : on vit outre le Rhin et le Rhône, l’Océan représenté en or sous la forme d’un captif. C’était en Egypte qu’il avait cueilli son second laurier : dans ce triomphe parurent les images du Nil et d’Arsinoe, et celle du Phare, qui semblait étinceler de tous ses feux (46). Le troisième présenta devant son char Pharnace et le Pont. Le quatrième montra Juba, les Maures et l’Espagne deux fois soumises. Rien ne rappelait Pharsale, Thapsus, Munda, victoires bien plus grandes, dont il ne fit pas l’objet d’un triomphe (47).

Alors enfin on posa les armes. La paix qui suivit ne fut pas ensanglantée, et la clémence du vainqueur compensa les cruautés de la guerre. Il ne fit mourir personne, excepté Afranius (c’était assez de lui avoir pardonné une fois), Faustus Sylla (Pompée l’avait appris à craindre ses gendres), et la fille de Pompée, avec ses cousins-germains du côté de Sylla : il voulait assurer le repos de sa postérité. Ses concitoyens ne furent pas ingrats ; ils accumulèrent tous les honneurs sur sa tête privilégiée. Ses statues autour des temples, le droit de porter au théâtre une couronne entourée de rayons éclatants, un siège éminent dans le sénat, un dôme sur sa maison, son nom donné à l’un des mois que parcourt le soleil, telles furent ces distinctions (48). On y ajouta le titre de Père de la patrie et de Dictateur perpétuel. Enfin, le consul Antoine, peut-être avec leur consentement, lui présenta, devant la tribune aux harangues, les insignes de la royauté (49).

Tous ces honneurs étaient comme les ornements dont on charge la victime destinée à la mort. La clémence du prince ne put triompher de la haine de ses ennemis : le pouvoir même de leur faire du bien pesait à des hommes libres. Le moment de sa mort ne fut pas plus longtemps différé. Brutus, Cassius, et d’autres patriciens conspirèrent contre sa vie (50). Admirez la puissance du destin ! Le secret de la conjuration était répandu au loin ; le jour même de l’exécution, on avait remis à César un mémoire qui l’en informait ; sur cent victimes égorgées, aucune n’avait offert de présages favorables. Cependant il vint au sénat, méditant une expédition contre les Parthes. A peine fut-il assis sur sa chaise curule, que les sénateurs se jetèrent sur lui et on l’abattit de vingt-trois coups de poignard. C’est ainsi que l’homme qui avait inondé l’univers du sang de ses concitoyens, inonda enfin de son propre sang la salle du sénat (51).

III. — César Auguste. — Le peuple romain, après le meurtre de César et de Pompée, semblait avoir recouvrer son ancienne liberté ; et il l’eût recouvrée, si Pompée n’eût pas laissé d’enfants, ni César d’héritier ; ou, ce qui fut plus funeste encore, si Antoine, autrefois le collègue de César, et qui alors aspirait à succéder à sa puissance, ne lui eût pas survécu pour jeter le trouble et des brandons de discorde dans le siècle suivant. Sex-