Aller au contenu

Page:Salluste - Traduction de Jean-Henri Dotteville, 1775, 4e édition.djvu/52

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

ticuliers ou pour l’État[1], à dépouiller les Temples des Dieux ; & à n’épargner ni le ſacré ni le profane. De tels ſoldats, devenus vainqueurs, ne laiſſerent rien aux vaincus. La proſpérité laſſe le ſage même, par les aſſauts qu’elle lui livre. Comment des gens ſi corrompus ſe ſeroient-ils modérés dans la victoire ?

XII. Dès que les richeſſes eurent commencé à procurer de la conſidération, à être ſuivies de la gloire, de la puiſſance & des honneurs, la vertu languit, la pauvreté paſſa pour infamie, & la probité, pour un deſſein de nuire[2]. L’abondance f‍it naître parmi la jeuneſſe le luxe, l’avarice & l’orgueil. De-là le pillage & les profuſions. On compta ſon bien pour rien ; on deſira celui d’autrui : honneur, amitié, pudeur, droit di-

  1. « Ces deux mots, Privatim & Publicè doivent être entendus de ce qui ſe ſaiſoit, tant au nom du Public, que par une autorité particuliere. . . . Quelquefois ces brigandages s’exerçoient par les Quef‍teurs, au nom du Peuple Romain, & d’autres fois c’étoient les particuliers qui s’approprioient ces richeſſes. » (Journal de Trévoux, p. 978.)
  2. pro malevolentiâ. C’ef‍t ainſi qu’on regardoit la probité de Caton, lorſqu’il s’oppoſoit aux deſſeins de Céſar & des autres factieux qui troubloient l’État. Quand quelqu’un nous contrarie, nous aimons mieux penſer qu’il le fait dans le deſſein de nous nuire, que par amour pour le bon ordre.