Page:Salverte - Essais de traductions, Didot, 1838.djvu/35

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des actions courageuses et une réputation sans tache. Dans son champ ou aux armées, ne manquant jamais d’un honnête nécessaire, le moindre des citoyens suffisait à la patrie et à lui-même. Mais lorsque le pauvre, expulsé peu à peu de son héritage, livré à l’indigence et à l’oisiveté, n’eut plus de demeure assurée, il commença à rechercher le secours des riches, et à rendre vénales sa liberté et la république elle-même. Ainsi s’est insensiblement dissous ce peuple souverain, dominateur des nations ; et à l’empire commun à tous les citoyens, chacun a substitué son propre esclavage.

Une telle multitude adonnée à des professions et à des genres de vie si variés, toute infectée de la dépravation des mœurs, toute composée d’éléments incohérents, me semble à moi-même peu propre à la gestion des affaires publiques. Mais j’espère fortement que, si on l’augmente de nouveaux citoyens, tous ensemble s’éveilleront à la liberté, et au désir, les uns de conserver leurs droits, les autres de terminer leur servitude. Il sera donc à propos d’établir, dans les colonies, un mélange d’anciens citoyens et de nouveaux. Cette mesure accroîtra nos ressources militaires ; et le peuple, occupé de soins utiles, cessera de travailler au malheur public.

Je prévois sans peine combien l’exécution de ce plan excitera de fureurs et d’orages dans le parti des nobles. Ils s’indigneront de voir renverser de fond en comble toutes les institutions, imposer un joug si dur aux anciens citoyens, changer enfin en monar-