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vertu est une et pénible ; chacun, au contraire, choisit la route qu’il lui plaît pour arriver aux richesses ; on les obtient par de bonnes et par de mauvaises actions.

Il faut donc, avant tout, ôter leur crédit aux richesses. Que nul ne soit, selon sa fortune, jugé plus ou moins digne de prononcer sur l’honneur ou la vie d’un citoyen ; que la préture et le consulat soient accordés au mérite, et non à l’opulence.

Sur ces magistrats, le peuple porte facilement un jugement éclairé. Quant aux juges, si la nomination appartient à un petit nombre d’hommes, c’est despotisme ; les choisir d’après leur richesse, c’est infamie. Que tous les citoyens de la première classe composent les tribunaux : mais qu’ils y siègent en plus grand nombre qu’aujourd’hui. Les Rhodiens et bien d’autres cités n’ont eu jamais à se repentir de la composition de leurs tribunaux, où les pauvres et les riches, indifféremment, suivant que le sort appelle chacun d’eux, décident des plus grands et des moindres intérêts.

C. Gracchus, dans son tribunat, porta, sur l’élection des magistrats, une loi d’après laquelle les centuries des cinq classes y devaient être appelées sans distinction, par la voie du sort. Je l’approuve, et non pas sans raison : les dignités et les richesses ne troublant plus l’égalité, les citoyens s’empresseront de se surpasser l’un l’autre par la vertu.

Je[1] ne propose point de remèdes plus violents con-

  1. Au lieu de haec je lis haud que l’on trouve dans quelques éditions, ou nec, comme on lit dans des éditions antérieures à celle de S. Havercamp ; cela ne change rien au fond des idées, et parait mieux approprié au dessein que Salluste indique d’écarter toute proposition de mesures violentes contre les riches.