Page:Salverte - Essais de traductions, Didot, 1838.djvu/49

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sénat doit tirer sa force de sa sagesse, et la défiance devient inutile au peuple. C’est ainsi que nos ancêtres, pressés par les guerres les plus rudes, ayant perdu leurs trésors, leurs chevaux, leurs soldats, ne se lassèrent jamais de défendre leur empire les armes à la main : ni le dénûment du trésor public, ni la supériorité des ennemis, ni les revers ne purent contraindre ces grandes âmes à ne point retenir jusqu’au dernier souffle de la vie, ce qu’avait conquis leur courage. Ils y ont réussi, plus encore par des résolutions magnanimes que par des victoires. C’est que, pour eux, la chose publique était une ; tous s’en occupaient, on ne formait des ligues que contre l’ennemi. Chacun exerçait son esprit et son corps, non pour accroître son influence personnelle, mais pour se rendre utile à la patrie.

De nos jours, au contraire, des nobles plongés dans la mollesse et la lâcheté ; ne connaissant ni le travail, ni les camps, ni l’ennemi ; nourris aux factions au sein de leurs familles, commandent avec arrogance à toutes les nations. Le sénat, dont la sagesse affermissait jadis la république chancelante, maintenant opprimé, flotte çà et là au gré de quelques passions particulières, décide tantôt dans un sens, tantôt dans un autre, et ne voit le bien ou le mal public que là où le placent les démêlés ou l’orgueil des dominateurs.

Si les sénateurs jouissaient tous d’une égale indépendance, ou si les votes avaient moins de publicité, l’intérêt de l’État aurait plus de force, et la noblesse