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sur les citoyens, tantôt sur les alliés, renversent l’ordre établi, et, au milieu du trouble, renouvellent leurs richesses[1].

Il faut donc proscrire désormais les prêteurs et l’usure, afin que chacun ne s’enrichisse que par le soin de ses propres affaires. Grâce à ce moyen simple, mais efficace, on verra le magistrat exercer ses fonctions pour l’intérêt du peuple, et non d’un créancier, et mettre son honneur à accroître la richesse de l’État et non à s’enrichir de ses pertes[2].

Je sais combien cela présentera d’abord de difficultés, surtout de la part de ceux qui, dans la victoire, espéraient trouver plus de liberté et de licence, et non des lois répressives. Mais en travaillant à sauver ces mêmes hommes, plutôt qu’à flatter leurs passions, tu peux assurer une paix solide à eux, à nous, à nos alliés. Si, au contraire, notre jeunesse conserve les mêmes goûts et les mêmes mœurs, ta réputation, quelque brillante qu’elle soit, s’écroulera bientôt avec la république.

L’homme sage ne fait la guerre que pour avoir la

  1. « Faire de nouvelles acquisitions aux dépens des anciennes. » (Beauzée) … Chercher de vieux moyens pour acquérir de nouveaux biens. » (Debrosses.) Je ne comprends pas ces deux versions. « Ils sacrifient la fortune de l’État pour relever la leur. » (Dureau de la Malle.) Veteribus ne peut être traduit par la fortune de l’état. Je crois avec Wasse que le texte est altéré. Le sens de l’auteur est peut-être, qu’après s’être ruinés par le désordre et la profusion, les nobles emploient les débris de leur ancienne fortune, et les emprunts que leur procure encore le crédit attaché à leur nom, pour acheter des suffrages, et parvenir à des magistratures où, par le brigandage et la concussion, ils renouvellent leurs richesses.
  2. Beauzée ne sépare via est de magistratum que par une virgule, et fait dire à l’auteur que le moyen de réprimer l’excès des dépenses, est d’amener le magistrat à ne plus gérer ses fonctions pour ses créanciers, mais pour le peuple. Mais Salluste attribue les maux de la république à un amour effréné du luxe, et surtout à l’usure qui, fournissant au prodigue des ressources perfides, le plonge dans un tel abîme qu’il n’en peut plus sortir que par le renversement des lois et de l’État. Or, un règlement somptuaire et la répression de l’usure peuvent être l’objet de lois positives, et non pas l’intégrité des magistrats, qui doit résulter, au contraire, de l’efficacité de ces lois.