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ŒUVRES DE ALBERT SAMAIN

vois-tu, que ce qui reste en moi de mon âme d’autrefois se demande si vivre ainsi n’est pas un péché !

Au bout du quinzième jour, on signala l’Italie. En entendant prononcer ce nom qui contenait tout son rêve, Angisèle tressaillit, et, penchée à l’avant du vaisseau, elle fixa éperdument l’horizon.

Lentement, les côtes apparurent, à peine visibles encore et comme flottantes dans une brume ; puis les lignes se précisèrent et Angisèle aperçut successivement des taches sombres de verdure, des groupes de maisons éparses çà et là, et enfin, dans un lointain violet, au bord d’un golfe doucement arrondi, qu’emplissait un peuple de navires et de barques, la ville magnifique et blanche, répandue sur les pentes comme un collier de perles à demi sorti d’un coffret.

Alors elle se serra contre Rovère et se mit à trembler légèrement dans ses bras, pendant qu’une grande pâleur couvrait ses joues.