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Page:Samain - Œuvres, t3, 1921.djvu/175

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CONTES


Au seuil de son rêve, elle éprouvait le vertige mélancolique du bonheur.

Rovère la conduisit dans son palais. Là, parmi des galeries éclatantes, les salles de marbre, les vestibules ornés de colonnes polies comme des miroirs, les plafonds décorés de nobles peintures, les terrasses aux superbes perspectives, les jardins profonds et délicieux, tout pleins d’eaux jaillissantes, elle promena des journées d’inexprimable ravissement.

La force des sensations qu’elle éprouvait précipitait en elle les flots du sang. Elle vivait dans un paroxysme de joie et il lui semblait que toutes les fibres de son être résonnaient mélodieusement. Baignée de soleil et d’amour, elle s’épanouissait merveilleuse et charmante, et ses traits, neutres jusque-là, s’exaltaient jusqu’à la rendre belle, comme si la Beauté, dans l’ordre mystérieux de l’univers, n’était que la fixation matérielle du bonheur. Parfois, elle s’arrêtait en chemin pour dire à Rovère qui lui parlait :