Page:Sand - Adriani.djvu/141

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ou inévitable, je veux tout vous dire, et je jure que ce sera la vérité.

Adriani raconta avec détail et fidélité, au baron, tout ce qui s’était passé entre madame de Monteluz et lui.

Le baron l’écouta avec intérêt, s’émerveilla de la rapide invasion d’un amour si entier chez un homme qu’il croyait connaître, et que jusque-là il n’avait pas connu jusqu’au fond, et finit par conseiller la prudence à son jeune ami. Le baron était un digne homme et un excellent esprit à beaucoup d’égards ; mais la poésie de son âme s’était réfugiée dans ses vers, et la vie de province avait grossi à ses yeux l’importance des choses positives. Délicat dans le domaine des arts, mais en proie à des soucis matériels qu’il cachait de son mieux, il avait, malgré son lyrisme et ses enthousiasmes littéraires et musicaux, contracté quelque chose de la sécheresse des vieux garçons.

Adriani souffrait de lui avoir fait sa confidence, mais il ne se le reprocha point. Il s’y était vu forcé pour conserver intacte l’auréole de pureté autour de son idole.

Selon le baron, il n’y avait pas de grande douleur sans un peu d’affectation à la longue. S’il n’osait pas tout à fait dire et penser que madame de Monteluz posait les regrets, il n’en admettait pas moins la probabilité d’un instinct de coquetterie sévèrement drapée dans son