Page:Sand - Andre.djvu/226

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rude essai de ses forces contre l’énergie de ces potions diaboliques.

Mais André était si bon et si doux qu’il fut un instant ému et persuadé par ces grossières démonstrations d’amitié. Le marquis l’observait attentivement, tout en poursuivant sa déclamation.

Il vit sur son visage des traces d’attendrissement, et, empressé de ressaisir son empire, il en profita pour frapper les derniers coups. Mais il le fit d’une façon maladroite. Il se risqua à vouloir couvrir d’infamie la conduite de Geneviève, à la présenter comme une intrigante qui tâchait d’envahir le cœur et la fortune d’un enfant crédule. André retrouva, comme par enchantement, le peu de forces qu’il avait apportées à cet entretien. Il sortit en déclarant à son père qu’il appellerait à son secours la justice, le bon sens et les lois, s’il le fallait. Avec une résistance plus patiente et plus ménagée, il aurait pu vaincre l’obstination du marquis ; mais André craignait trop la fatigue du cœur et de l’esprit pour entreprendre une lutte quelconque.

Joseph vint à sa rencontre sur l’escalier et lui dit : « J’ai entendu le commencement et la fin de la querelle. Cela s’est passé comme je m’y attendais. Le char à bancs est prêt ; partons. »

Ils partirent si lestement que le marquis n’eut pas le temps de s’en apercevoir. Joseph, enchanté de faire un coup de tête, fouettait son cheval en riant aux éclats ; et André, tout tremblant, songeait à la