Page:Sand - Andre.djvu/34

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la rue. Si le chien a l’air de n’être pas belliqueux, vous pouvez même aller jusqu’à l’assommer d’un grand coup de pied en passant ; cela fait bien et donne l’air crâne. Surtout évitez de jurer ; la grisette hait tout ce qui sent le paysan. Ne gardez pas votre pipe à la bouche en lui donnant le bras ; elle est exigeante et veut du respect. Glissez-lui un compliment agréable de temps en temps, en procédant toujours par comparaison ; par exemple, dites : Mademoiselle une telle est bien jolie, c’est dommage qu’elle soit si pâle ; ce n’est pas une rose du mois de mai comme vous. Si votre belle est pâle, parlez d’une personne un peu trop enluminée, et dites que les grosses couleurs donnent l’air d’une servante. Mais surtout choisissez dans la première société les beautés que vous voulez dénigrer ; votre compliment sera deux fois mieux accueilli. Enfin, au moment de quitter votre infante, prenez un air respectueux, et demandez-lui la permission de l’embrasser. Dès qu’elle aura consenti, redoublez de civilité et embrassez-la le chapeau à la main ; aussitôt après saluez jusqu’à terre. Gardez-vous bien de baiser la main, on se moquerait de vous. Replacez-lui son châle sur les épaules ; louez sa taille, mais n’y touchez pas. Faites ce métier-là cinq ou six jours de suite ; après quoi vous pouvez tout espérer.

— Et cela suffit pour être préféré à un amant en titre ?

— Bah ! quand on n’a peur de rien, quand on ne