Page:Sand - Antonia.djvu/172

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

de la France, et il y avait alors des moments où le roi, épouvanté, s’efforçait de ressusciter la monarchie de Louis XIV : tristes et vains efforts, mais qui, regardés d’un certain point de vue, paraissaient assez sérieux pour irriter le peuple et pour augmenter la morgue des privilégiés. La cour et la ville avaient acclamé le triomphe de Voltaire ; au lendemain de ce triomphe, le clergé lui refusait une tombe. Mirabeau avait écrit un chef-d’œuvre contre l’arbitraire des lettres de cachet. Le roi avait dit de Beaumarchais : « Si l’on jouait sa pièce (le Mariage de Figaro), il faudrait donc détruire la Bastille ! » Le tiers grandissait en lumières, en ambition, en valeur réelle ; la cour rétablissait les privilèges dans l’armée comme dans le clergé, et décidait — ce que le cardinal de Richelieu n’eût osé faire — que, pour être officier ou prélat, il fallait désormais faire preuve de quatre générations de noblesse. La constitution américaine venait de proclamer les principes du Contrat social de Jean-Jacques ; Washington et la Fayette rêvaient l’affranchissement des esclaves ; le ministère français accordait de nouveaux encouragements à la traite des noirs ; le bas clergé se démocratisait de jour en jour ; la Sorbonne cherchait querelle à Buffon, et le haut clergé demandait une loi nouvelle pour réprimer l’art d’écrire ; l’opinion s’élevait contre la peine de mort, la question préparatoire était encore en vigueur, La reine avait protégé Beaumarchais ; Raynal était forcé de s’exiler.