Page:Sand - Antonia.djvu/293

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lui qu’elle ne craigne rien ; dis-lui que je lui jure sur tout ce que j’ai de plus sacré qu’elle ne m’apercevra plus jamais. M’entends-tu, Marcel ? Réponds-moi et ôte-moi le supplice de l’incertitude.

— Eh bien, tout cela eût vrai, dit Marcel après un peu d’hésitation. Madame d’Estrelle est prisonnière sur parole ; mais c’est une parole qu’elle s’est donnée à elle-même, et que personne ne la contraint à observer. Elle est libre de revenir, mais elle ne peut plus te voir.

— Elle ne peut plus, ou elle ne veut plus ?

— Elle ne peut ni ne veut.

— C’est bien, Marcel, en voilà assez ! Porte-lui mon serment de soumission et ramène-la chez elle. Elle est assez tristement logée là-bas, et cette solitude doit être affreuse. Qu’elle retrouve ses amis, ses aises, sa liberté. Pars tout de suite, va, cours donc ! Je ne veux pas qu’elle souffre pour moi un moment de plus !

— Bien, bien, j’irai, dit Marcel. J’y vais ; mais toi ?

— Il s’agit bien de moi ! s’écria Julien. Comment ! tu n’es pas parti ?

Et il mit Marcel à la porte par les épaules, tout en l’embrassant.

Dès qu’il l’eut perdu de vue, il rentra près de sa mère.

— Eh bien, lui dit-il avec un visage riant, tout va mieux que je ne l’espérais : madame d’Estrelle n’est pas captive ! Elle reviendra bientôt.