REBEC, se redressant et payant d’audace. Lycurgue, municipal de cette commune.
LE DÉLÉGUÉ, à ses secrétaires. Interrogez-le ; moi, je souffre comme un damné ! (Il met la tête dans ses mains et ses coudes sur la table, que les femmes ont apportée, ainsi qu’une bouteille et des gobelets d’étain.)
LE PREMIER SECRÉTAIRE, à Rebec. Es-tu de ce pays ?
REBEC. J’y réside depuis le temps voulu, citoyen.
LE SECRÉTAIRE. Où étais-tu auparavant ?
REBEC. En Vendée, près de Puy-la-Guerche, où j’avais la commission de faire brûler les châteaux des anciens nobles. J’en ai brûlé douze !
LE SECRÉTAIRE. Tu te vantes ; on n’en a pas brûlé six en tout de ce côté-là. Avance ici, lieutenant.
HENRI, sans bouger. Vous me parlez, monsieur ?
LE DEUXIÈME SECRÉTAIRE. Le citoyen délégué veut te parler. (Henri s’approche.)
LE DÉLÉGUÉ. Connais-tu cet homme, à qui tu parlais bas tout à l’heure ?
HENRI. Oui, monsieur.
LE DÉLÉGUÉ. Où l’as-tu connu ?
HENRI. À Puy-la-Guerche et aux environs.
LE SECRÉTAIRE. À-t-il brûlé réellement des châteaux ?
HENRI. Je n’en sais rien.
LE PREMIER SECRÉTAIRE. Mais… attendez donc ! Il y avait par là le repaire du fameux rebelle Sauvières. J’ai bonne mémoire, moi. (À Rebec.) Est-ce toi qui l’as brûlé ?
REBEC, troublé, regardant Henri. Je ne me souviens pas bien si c’est moi ou un autre…
HENRI. Tu as obéi à ta consigne. Chacun avait la sienne.