Page:Sand - Confession d une jeune fille - vol 1.djvu/134

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

lement à ma contenance que j’étais fort peinée, et il me tendit sa grande main, où je mis la mienne en retenant une larme. J’espère qu’il la devina et ne douta point de mon affection. Quant à Marius, il fut si confus de voir ses accusations victorieusement anéanties par le départ de Frumence, qu’il fut beaucoup plus abasourdi que moi. Il répondit à peine, et gauchement, lui qui savait si bien saluer, au salut froidement poli de notre précepteur.

— Tu le vois, lui dis-je quand nous nous retrouvâmes seuls, tu as cru à des mensonges affreux, et les vilains complots que tu supposais n’existent pas. Conviens donc que tu as été très-injuste, et ne laisse pas partir ce pauvre ami à qui tu as fait de la peine, sans te réconcilier avec lui.

Marius me le promit, et sans doute il fit de bonnes réflexions dans la nuit, car dès le lendemain matin il prit son cheval et alla rendre visite à Frumence. Je ne sais s’il eut le courage de lui demander franchement pardon ; mais sa démarche était un acte de repentir et de déférence dont les Costel lui surent gré. Le soir, Marius prit congé de ma grand’mère et de moi en pleurant. C’était la première fois qu’il montrait un peu de sensibilité, et j’en fus vivement émue. Je ne me demandai pas si c’était le chagrin de quitter le bien-être de la