Page:Sand - Confession d une jeune fille - vol 1.djvu/257

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le tort ou le ridicule de l’aventure. Jennie comprit que j’avais raison, et se chargea de dire à ma grand’mère ce qui s’était passé.

J’entrai donc du jour au lendemain, et par ma propre volonté, dans une nouvelle phase de mon existence, la solitude morale, et je me risquai à porter sans l’aide de personne le terrible fardeau d’un cœur troublé et inoccupé. Je ne mis pas d’affectation à fuir Frumence. Il venait avec son oncle, qui nous disait la messe à Bellombre les grands jours fériés. Je le rencontrais quelquefois aussi dans mes promenades, et je l’abordais amicalement ; mais, comme j’étais toujours à cheval et lui à pied, nous nous quittions après avoir échangé quelques mots. Je ne lui envoyais plus mes extraits, je ne le consultais plus sur rien.

Marius eut, je crois, à Toulon, une petite affaire de cœur en ce temps-là, et, sous divers prétextes, ses visites hebdomadaires devinrent tout au plus mensuelles. Jennie avait si peu encouragé mon besoin d’expansion, que je ne lui parlai plus de mes perplexités. Je m’absorbai avec elle dans les soins à rendre à ma grand’mère, auprès de qui je travaillais presque tout le temps qu’elle était levée. Le soir, quand elle se retirait, — et c’était toujours de bonne heure, — je lisais encore un peu dans ma chambre. À six heures du matin, j’étais à che-