Page:Sand - Confession d une jeune fille - vol 2.djvu/19

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« Il n’aimait rien au monde comme de changer de place ; aussi quand au bout d’un an il me vit sur le point d’accoucher, il fut bien mortifié de l’idée de s’arrêter quelque part. Je proposai d’aller faire mes couches à Saint-Michel d’Ouessant, où je mettrais mon enfant en nourrice ; car il fallait me priver de le garder avec moi, ou renoncer à l’état que nous faisions. Je retournai donc au pays, où je retrouvai mon père marié à une autre femme qui ne se souciait pas de m’avoir dans la maison, et je dus m’établir chez une amie que j’avais à la côte, et qui, pouvant sevrer son dernier enfant, m’offrit de nourrir le mien. Cette amie, qui était très-brave femme, s’appelle Isa Carrian, et on la retrouvera, je pense, quand on voudra, dans le même endroit, ainsi que son frère Jean Porgut. C’est là que je mis au monde une petite fille qui fut nommée Louise, et qui naquit le 3 juillet 1803.

« Aussitôt que je fus en état de reprendre mon commerce, j’allai rejoindre mon mari, qui m’attendait à Lannion. Il s’était débarrassé de notre fonds avec plus de perte que de profit, et j’avais bien fait de mettre quelque petite chose de côté, car il n’entendait rien aux affaires, et il s’y embrouillait aussitôt qu’il voulait s’en occuper lui-même. Je le trouvai changé, et vivant avec des gens dont je ne pris pas bien bonne opinion, car