Page:Sand - Confession d une jeune fille - vol 2.djvu/64

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lui inspirer ce bon mouvement ! je serais peut-être forcée de l’accepter, puisque c’est un devoir pour moi de sauver des outrages le nom que ma grand’mère m’a transmis.

— Voyons, Lucienne, est-ce le dépit qui vous fait parler ? Soyez franche, est-ce que c’est bien arrêté que vous n’avez plus d’amitié pour Marius ?

— De l’amitié, si fait, j’en ai encore. Je lui pardonne d’être égoïste et peureux. Je l’estime quand même à d’autres égards… Mais…

— Mais quoi ? Vous ne l’aimez pas d’amour, je le sais bien, et il m’a toujours semblé que vous ne vouliez pas connaître l’amour.

— Je désire, en effet, ne pas le connaître. C’est un sentiment exalté que je crains… Mais…

— Mais quoi encore ?

— Ah ! Jennie, je ne sais pas ; il me semble qu’il y a amitié et amitié. Il me semble que, si tu n’as pas d’amour pour Frumence…

— Je n’en ai pas.

— Soit ! mais ton amitié pour lui est une confiance absolue dans son caractère, et cette amitié-là doit être bien douce !

— Oui, c’est une bonne chose ; mais vous rencontrerez bien peu de caractères comme Frumence. Il est peut-être seul de son espèce. Songez donc qu’il n’a pas vécu comme un autre, et qu’il